par Marie-Paule Chardon
2012, in La Revue des revues no 48
Cliniques, Paroles de praticiens en institution est la revue du Collège des psychologues Clinéa-Orpéa, psychologues qui, pour certains, constituent le comité de rédaction et rédigent des articles. D’autres sont écrits par des professionnels reconnus appartenant au Comité de Surveillance et de Lecture tels que pour les trois premiers numéros : P. Delion, S. Missonnier et J.-P. Chartier. C’est la première fois qu’une revue émanant d’un collège de psychologues existe. Ce type de regroupement collégial a de plus en plus cours dans les institutions publiques. Ici il s’agit de lieux de soin (cliniques psychiatriques, maisons de retraite,…) au sein du groupe privé Clinéa-Orpéa. Elle est publiée par les éditions érès. La ligne éditoriale indique que Cliniques veut “explorer des thématiques cliniques diverses sous l’angle de la pratique en institution”. Il existe une autre revue qui travaille l’institutionnel, c’est Institutions, revue de psychothérapie institutionnelle, revue de la fédération inter-associations culturelles basée à la clinique psychiatrique de la Borde et qui a vu le jour en 1986.
Cette revue a pour titre “Cliniques”. Qu’est-ce que la clinique ? Foucault a montré à propos de la médecine que la clinique s’est d’abord constituée comme méthode, démarche basée sur le singulier, c’est-à-dire, comme le précise F. Ansermet “pour penser l’articulation de l’un et du multiple, en cherchant le général au point le plus extrême du particulier”*. Dans cette filiation, la psychologue clinicienne Michèle Huguet (Professeur à Paris 7) nous donne à voir une des originalités de la démarche clinique en psychologie, à savoir : “S’attacher au concret, se soumettre au réel pour être surpris, faire surgir la particularité du phénomène, lui redonner ce poids essentiel en clinique d’excéder toujours la théorie”**. En cela elle s’appuie sur Merleau-Ponty et la description phénoménologique : ce mouvement qui décrit avant de pouvoir analyser ou expliquer revient “aux choses mêmes”. Elle met à jour la contradiction propre à la clinique : “les faits ne parlent pas d’eux mêmes, ils ne parlent plus du tout si on les enferme trop tôt dans la théorie. Mais on ne peut rien en dire si aucune visée théorique n’a conduit leur recueil.”** C’est donc la présence d’un hiatus entre théorie et pratique dont le clinicien se sert pour construire du nouveau.
Dans les années 60-70, la théorie primait. Aujourd’hui la clinique est à la mode : en cela la revue Cliniques est bien dans son époque. Les titres des quatre rubriques qui la constituent parlent d’eux-mêmes : “Au seuil de la prise en charge”, “Parcours institutionnels”, “Traversées cliniques”, “Les frontières du soin”.
Quant aux thématiques traitées, en 2011 ce sont “Contenance et soin psychique” et “De l’effraction au traumatisme”. En 2012, “Les enjeux de la pluridisciplinarité” et “De la perte au renoncement”. En 2013, avis aux auteurs pour “Du traumatisme aux voies thérapeutiques possibles” et “Ordres et désordres de l’oralité aux différents âges de la vie”.
*François Ansermet, « Les inventions de la clinique » in Vacarme no 29, automne 2004.
** Michèle Huguet, « La méthode clinique » in La psychologie et ses méthodes, Paris : Le Livre de poche, 1995.