par Gilles Candar
2008, in La Revue des revues no 42
Écrire l’histoire est une revue semestrielle dont le sous-titre explicite le projet : Histoire / Littérature / Esthétique. Il s’agit d’interroger l’écriture de l’histoire en croisant les approches et les interrogations réciproques venues des divers champs disciplinaires des sciences humaines. La revue veut donc constituer « un espace de confluences des histoires de l’histoire, des historiographies, mais aussi de toutes les pratiques symboliques qui […] prennent l’histoire pour matériau » : écrire, mais aussi raconter, peindre, filmer, jouer, chanter, figurer, défigurer, configurer, reconfigurer, penser, repenser…
Le noyau fondateur de la revue est formé par des enseignants de l’université Paris VII-Diderot, habitués aux perspectives transdisciplinaires. Si les historiens semblent majoritaires dans la rédaction, la direction de la revue appartient à deux littéraires, Claude Millet, responsable du groupe Hugo à Paris VII et Paule Petitier, spécialiste de Michelet, mais aussi Balzac et Mérimée, appuyées par l’EA 1818, Littérature et civilisation du XIXe siècle de leur Université. Les équipes ne sont sans doute pas encore tout à fait fixées, puisque leur structure évolue dès le passage du no 1 au no 2 : remaniement du conseil de rédaction, suppression du secrétariat de rédaction et mise en place d’un comité de lecture. La revue entend ne pas s’enfermer dans le seul XIXe siècle, puisque font aussi partie de la rédaction des spécialistes d’autres périodes, comme le médiéviste Pierre Savy ou le dix-huitiémiste Marc Hersant. Écrire l’histoire est une revue d’universitaires, mais sont aussi représentées, du moins dans le Comité d’honneur, l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (Arlette Farge, Stéphane Audoin-Rouzeau, Anne-Marie Thiesse), l’École Normale Supérieure LSH de Lyon et, au sein du Comité de lecture, apparaît le CNRS. Un ancrage international est également revendiqué par le biais du Comité d’honneur avec quelques figures de proue de la recherche américaine, allemande et israélienne.
La revue publie donc deux numéros par an, en mai et en septembre, consacrés à un même thème, décliné sur deux livraisons. Le dossier ainsi constitué doit être à nouveau publié l’année suivante dans une version revue et augmentée en édition électronique. Les textes de l’édition-papier restent en effet de dimensions relativement modestes, assurément plus proches des 20 000 signes que des 50 000, pour un ensemble de 160 pages, présentées de manière très aérée et avec de nombreuses illustrations. La représentation de l’histoire est appelée à occuper une place assez importante dans la revue, comme en témoignent les premiers articles sur Daumier, Delacroix, la télévision ou les films documentaires, ainsi que la présence de Pierre Georgel au sein du Comité de lecture.
Chaque numéro devrait comporter, outre le dossier principal, un entretien, une traduction, des lectures, voire un dossier secondaire ou des varia et une bibliographie de l’actualité historique. Le premier dossier sur les émotions commence par des études sur le traitement de l’émotion au cours de périodes bien distinctes : Commynes et le Moyen Âge, Saint-Simon et la Cour de Louis XIV, avec en axe le grand XIXe siècle romantique : Barante, Delacroix, Michelet, Lamartine et Daumier, puis la période contemporaine : débuts de la Guerre froide et contestations internes à Tsahal après la 2e guerre du Liban. La deuxième partie de ce dossier est de portée plus historiographique ou épistémologique avec une interrogation sur les émotions historiennes et des mises au point sur l’altérité des régimes émotifs de l’Antiquité ou du Moyen Âge par rapport à notre époque, avec des articles sur le traitement des émotions par le cinéma documentaire ou la télévision. L’entretien fonctionne aussi comme garant du numéro et mode de passage auprès d’un public moins averti : Arlette Farge et Alain Corbin initient cette fonction dans les premiers numéros. La partie bibliographique reste encore assez limitée, quoique ciblée sur des écrits importants pour le sujet retenu, mais sans doute sans volonté d’exhaustivité comme semble le confirmer l’absence, étonnante ici pour un tel sujet, de discussion de L’Empire des émotions de Christophe Prochasson (Demopolis, janvier 2008).
Le dossier annoncé pour 2009 porte sur le détail, avec Henri Cueco et Didier Daeninckx cette fois comme personnalités interviewées et des sommaires toujours très diversifiés dans leurs objets comme dans leurs approches. Les morales sont au programme de 2010 et Ailleurs le thème retenu pour 2011.