par Éric Dussert
2005, in La Revue des revues no 36
Le lancement d’une revue de poésie internationale à Rabat n’est pas un événement si banal qu’on puisse le passer sous silence. Il est même si peu courant, depuis les années noires de la seconde guerre mondiale où le Maghreb comptait tant tout à coup, qu’on a plaisir à saluer la naissance d’une revue dont l’objectif aussi nettement affiché est de tendre un pont entre les poètes, et la main pour « célébrer la lumière de la fraternité nord-sud ». Éditée à Rabat, Électron libre bénéficie de soutiens et de complicités nombreuses. Son comité de rédaction est à ce titre éloquent : du Sénégal à la Chine, en passant par la Bosnie et le Canada, toute la planète semble participer. Et ce n’est peut-être qu’un début.
Son sommaire, anthologique à souhait, propose d’ores et déjà un mélange de manières, de matières, de styles et de générations (Hugo Claus, Volker Braun, Gozô Yoshimasu…) ne dédaignant pas les nouvelles plumes lorsqu’elles ont déjà été remarquées dans leur pays d’origine (Linda Maria, Abdel-Illah Salhi, Mercédès Roffé, Senadin Musabegovic, Boris Murana…). Outre le désenclavement de la poésie marocaine (un éditorial dit l’état d’ennui qui règne dans la culture au Maroc, mais on pourrait ajouter qu’à Paris non plus on ne s’amuse pas beaucoup), une telle publication devrait, en bonne logique, donner aux uns et aux autres quelques idées de traductions… Puisse l’Électron libre tournoyer longtemps.