par Jean-Baptiste Levée
2013, in La Revue des revues no 49
Qu’est-ce qui, en 2013, peut animer la création d’un support physique dédié à l’objet livre ? Avec la dématérialisation du contenu éditorial, The Shelf Journal navigue à contre-courant et s’attarde sur le nécessaire regain de design que la fabrication d’un imprimé nécessite, s’il veut se singulariser formellement et conceptuellement.
Le deuxième numéro vient de paraître [en janvier 2013], toujours avec pour credo la matérialité et le fétichisme qui entoure l’objet livre. Sur une centaine de pages, le semestriel développe une approche non pas bibliophilique, mais essentiellement esthétique du design de livre. On y traite avant tout de l’expérience sensible que constituent la manipulation, le choix des papiers, la reliure, la mise en page, les caractères typographiques. The Shelf Journal est tout entier dédié au vice délicieux qui consiste à apprécier le livre pour son raffinement, et l’adéquation entre la qualité de sa conception et le contenu qu’il sublime. Sans mettre la notion de collection à l’écart, The Shelf Journal se bat pour l’imprimé en tant qu’objet de design.
Bilingue français-anglais, évidemment soigneusement fabriquée [voir le gaufrage de la couverture Ndlr], abondamment et superbement illustrée, la revue propose des articles inédits ou des traductions d’articles anglais exhumés ( « La structure d’un livre », William Addison Dwiggins, 1927 dans le no 1). Les deux initiateurs du projet, Morgane Rébulard et Colin Caradec, sont à la fois juge, partie et bourreau : anciens de l’école Estienne, ils cumulent des expériences présentes en design typographique. Morgane Rébulard est également créatrice de caractères typographiques : ses créations Polyglot et Mabel sont d’ailleurs utilisées tout au long des pages de la revue.