Une semaine déjà, Morges nous accueillit.
La rencontre des revues pendant le Livre sur les quais fut pleine d’énergie, d’intérêt et de découverte.
La couleur des jours notamment, qui a déjà cinq ans.
Et nous y retrouvâmes son ainée, 10 ans tout ronds, viceversa littérature.
C‘est « une revue littéraire suisse qui paraît chaque année simultanément en français, en allemand et en italien ». Possédant des bases dans la deuxième langue, ainsi qu’en latin en plus d’une fréquentation hélas pas assez assidue de la Botte, je ressens à certaines pages une « étrangeté familière » : on y lit aussi du romanche.
Cette étrangeté familière appert dès la couverture qui juxtapose gravure classique et esthétique manga, établit un face à face entre deux versions de Heidi, mythe suisse par excellence.
300 pages très denses d’une belle et sobre maquette accueillent pour 70 d’entre elles des cartes blanches à des traducteurs et le regard de quatre bibliothécaires, représentant chacun une région linguistique (on oublie trop souvent par ici la rhéto-romane), sur l’année littéraire 2015.
Pour le reste ? Heidi en majesté. Heidi sous toutes ses formes. Heidi de haut en bas. Heidi en veux-tu en voilà.
Ils s’y sont mis à plus de vingt, pour beaucoup proposant des inédits. Des témoignages de lecteurs, souvenirs d’écrivains, créations littéraires composent les facettes d’un portrait au long cours, ouvert par un entretien avec Johanna Spyri, par Christine Lötscher (fictif, mais éclairant), ponctué d’illustrations de Camille Scherrer où l’on retrouve l’étrangeté familière, croisant un cahier de dessins par Alexandre Loye, et des textes mêlant les langues suisses, les formes –poésie, prose, entretien–, variant les distances, les points de vue et la révérence. L’ensemble se clôt sur « Heidi en regard(s) », aperçu des adaptations cinématographiques (Shirley Temple ne fut pas la première !), en dessin animé (le manga est daté de 1974) ou télévisuelles.
C’est ainsi que l’on prend la mesure du personnage, élevé au rang de mythe. Elle est suffisamment riche pour supporter les adaptations, les distorsions, l’irrévérence même.
Et puis, un scoop : on sait enfin qui est Heidi ! Rendez-vous page 77 et suivantes. Merci à Florian Eglin.
Yannick Kéravec