*des arts du langage, et quelques autres
Pour son numéro 2019, Larevue* accueille dans ses pages grand format seize auteurs pour quinze contributions.
C’est une revue lourde mais fine, de 184 pages tout de même, au papier lisse et très blanc, à l’encre très noire, des lettres qui pèsent.
Son format inhabituel 21 x 27 cm permet d’accueillir de la poésie au long cours, parfois très dense, parfois très aérée. Alin Anseeuw peut occuper 28 pages de textes courts qui se succèdent, manière de haïkus mais non, le compte de syllabes n’y est pas : c’est la succession des textes qui donne le rythme.
Trois séries graphiques qui se parlent accompagnent la poésie, trois propositions de femmes : Luisa Guardini qui emplit les pages d’une écriture énervée, au bord de la lisibilité (évoque Cy Twombly, de L’Ennemi), les encres délicates plus maîtrisées de Tomoko Kitaoka (cadastres ? plissés ?..), les broderies et reprises de Marie-France Dubromel, qui accompagnent (ou inspirent plutôt) les mots de Bruno Fern, photographiées en noir et blanc : je vous assure, j’y vois de la couleur !
Pour le verbe, vous lirez Edith Msika (qui fait varier forme et fond sur quatorze pages, en textes quasi-programmatiques sur l’écriture, l’auteur, l’adjectif antéposé…) et Séverine Daucourt (un portrait « cadré serré » d’un homme qui en prend pour son grade.)
Ces femmes évoquées portent des patronymes bi- ou trisyllabiques.
Par ailleurs les hommes, et permettez que je cède au goût de la liste, par ordre d’apparition au sommaire :
un certain Nathanaël (rien de plus, mais quelles pages denses, amples, pleines !), Anseeuw prolixe et déjà (pré)nommé et
Bast
Gréan
Mus
Sapin
Nuss*
Mare
Kràl
Fern*
Pozner
Comme un poème, déjà.
Ces autres textes vont explorer les formes définies (« Sonnets des satiétés » pour Benoît Gréan) ou pas, contemporaines, dans des propositions formelles (contrainte ?) (« 10 pièces» pour Mathieu Nuss) ou non, de quatre pages pour Christian Sapin (« Ici une demeure ») à l’ensemble de Anseeuw, la revue est très généreuse et laisse sentir le temps accordé, s’étendre l’espace du texte, battre la respiration des poèmes, ce que permet la typographie simple et le magnifique travail de mise en page, mise en forme de la poésie. Toute la poésie.
larevue*, une de ses demeures.
Yannick KÉRAVEC
Les directeurs de la revue Mathieu Nuss*, Bruno Fern*, avec Julien Nègre, éditeur.