Quaderno

Cahiers de poésie

par José M. Ruiz-Funes
1999, in La Revue des revues no 26

No1, printemps 1998

« Ceci est un revue de poésie carrée. Carrée dans l’allure ; carrée dans le principe. » Dès sa première ligne, les responsables de cette nouvelle publication nous invitent à la considérer en tant qu’objet. Jouons donc ce jeu. Format 16 cm x 20 cm, couverture claire quadrillée par une alternance de lignes vertes et bordeaux disposées dans un subtil (dés)ordre géométrique, titrage discret, le mot « poésie » apposé presque comme une note de bas de page. À l’intérieur, d’étroits filets noirs définissent les marges, encadrent les textes, semblent vouloir contenir une parole qui néanmoins déborde et parfois cogne contre les limites ainsi fixées. Ceci pour l’allure.
Quant au principe, l’abstraction baudelairienne se conjugue avec la suggestion mallarméenne, puisque « la modernité demande une autre clarté, une simplification neuve ». C’est un peu à prendre ou à laisser. La poésie se justifie par elle-même et n’a pas besoin d’autre discours que celui constitué par les mots qu’elle nous inflige ou avec lesquels elle nous caresse. « Chaque groupe de poèmes, aussi autonome que possible, fait son pré carré. » Et on saute, sans transition ni présentation, de Jean-Marie Gleize à Pierre Alfieri, de Cristóbal Santa Cruz à Michel Deguy, tout en faisant un détour par John Donne ou en tombant dans un délicieux exercice de poétique signé Christian Prigent. Il y a d’autres noms, d’autres prés carrés où l’on s’attarde ou qu’on traverse à la hâte pour peut-être y revenir un jour, à un autre moment. Rien ne presse. « L’horizon du vers est l’horizon de la poésie. » À quoi bon se dépêcher pour atteindre ce qui, par définition, est inatteignable ?


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