Le Tigre vous accueille par un baiser langoureux (fine grisaille sous le crayon d’Amélie Scotta). Multiplié par 16, il devient au cœur de la revue double planche sous forme d’un jeu « Les baisers de cinéma » : il faut restituer les lèvres à leurs différents propriétaires. Beaucoup moins sensuel : « Opfra, des journées à l’office de protection des réfugiés et apatrides » le feuilleton de Joël Boulvais. Drolâtique, le récit intégral par Antoine Zéo de la journée (24h chrono) organisée par le think-tank de droite « Fondation pour l’innovation politique ». Impressionnant, le reportage de Renaud Wattwiller sur le procès de pirates somaliens (Rennes, octobre 2013). Le temps d’un numéro double 36-37, Le Tigre peut multiplier le très sérieux qui ne se dépare d’une écriture tenue et personnelle, et le cocasse, la fantaisie (par exemple « La Liste de commissions », une collection de Clémentine Mélois). Trois superbes portfolios éclairent la livraison. On retiendra celui de Corinne Rozotte, « Dans les arbres » : la sensualité du baiser du seuil y trouve comme un écho dans la fine dentelle des branches presque dépouillées qui filtre délicatement des humains.
Frédéric Repelli