L’éditorialine, une pommade contre la pensée

Ça cause et ça ne dit rien, ou plutôt ça dit ce qu’on sait déjà, ce qu’on attend, ce qu’on reconnaît, ce qui diffère, dispense, arrange, maquille. L’éditorialine est un composé indolore contre les arêtes de la pensée, la difficile articulation du langage, la difficulté du comprendre. L‘onguent emprunte au caquet universel de l’expert, au fretin du politologue, à la scie des politiques, au prêt-à-parler, à la novlangue, à l’eau aseptisée des médias, à la rigolade obligatoire…Comment ne pas perdre le sens des mots ? Comment ajuster une pensée critique quand le « monstre doux » semble avoir dévorer le langage ? L’éditorialine ou l’éditorialisme généralisé, paroles qui de « rebonds » en « débats » ne cessent de taire avec autorité. Le mot est forgé par Michel Surya et d’Alain Jugnon au seuil du numéro 42 de Lignes (octobre 2013): « La pensée critique contre l’éditorialisme ». 17 contributeurs sont embarqués dans cette entreprise de démontage : des signatures familières, Jean-Pierre Curnier, Jacques Brou, Pierre-Damien-Huyghe, Sophie Wahnich, Véronique Bergen, Bruno Tackels ou encore le poète Philippe Beck et on découvrira peut-être l’Institut de démobilisation (section rennaise) : « il s’agit de donner une grande gifle à Ouest-France » mais plus stimulant encore – pensée critique à deux bandes – de  livrer une « Critique de la critique des médias ».

 

Marc Norget