Homosexualités en Afrique

 

« Rares sont les publications qui traitent frontalement des homosexualités en Afrique et s’engagent pour la déconstruction de l’homophobie » note Olivier Barlet, le directeur d’Africultures en ouverture de ce numéro 96 qui offre un fort dossier de près de 200 pages sur cette thématique coordonné par l’universitaire Anne Crémieux. Amorcé par un long entretien avec Louis-Georges Tin, il multiplie ensuite les approches sur un sujet à haut risque, voire tabou dans un continent où les législations restent impitoyables mais ne peuvent et ne savent empêcher les élans et les amours.  Un ensemble d’articles interroge les représentations des amours homosexuelles dans la bande dessinée (Aya de Yopougon dont les lecteurs de Libération se souviennent), la photographie (Zanele Muholi), l’écriture et plus encore le cinéma (pas étonnant dans une revue dirigée par le meilleur connaisseur des cinémas africains) en particulier à travers des films tunisiens fameux, dont L’Homme de cendres (film pionnier de 1985). La livraison offre – zone sensible – une galaxie d’entretiens, de témoignages de femmes et d’hommes engagés dans la lutte contre l’homophobie. Du travesti ivoirien Barbara au Tunisien Paloma Negra, en passant par Alice Nkom, avocate camerounaise qui milite pour la dépénalisation de l’homosexualité ou encore Stéphane, jeune Camerounais lui aussi : « tu es gay, c’est bien mais tu prends la porte ». Beau et utile  numéro d’Africultures: combien faudra-t-il de paroles de courage et de souffrance comme celles, ici, accueillies pour que la porte ne se referme plus ?

 

Marc Norget