L’Atelier contemporain n°1, L’Atelier contemporain n°2 (printemps 2014) comme une immense et magnifique chambre d’écho. Dans cette dernière livraison, retour d’artistes aimés (Alexandre Hollan, l’artiste Ann Loubert sur le peintre Clémentine Margheriti), rebond, bien sûr, de la question qui fonde la revue (« Pourquoi écrivez-vous sur l’art ? ») et réfléchie comme en miroir : « Que lisez-vous? », enquête lancée auprès d’une vingtaine d’artistes (de Mark Brusse à Gérard Titus-Carmel en passant par Gilles du Bouchet, Valérie Favre, Jean-Luc Parant, Jean Le Gac ou Pierre Skira). Échos au cœur même du numéro : Gérard Titus-Carmel lecteur à la bibliothèque aussi riche que secrète – manière d’autoportrait en livres – revient un peu plus loin dans le volume pour une série d’œuvres « Jungles » accompagnée d’un texte de Marc Blanchet : « Chaque peinture est une et en contient d’autres : Jungles de Titus-Carmel – hors de toute mosaïque –crée un vertige où la beauté des formes, dans un retour d’apparente ressemblance, rencontre son inachèvement. L’écho a trouvé ici une terre : il l’ensemence de ses voix. » (à l’image de L’Atelier contemporain ?). Par trois fois dans ce numéro 2, Jérémy Liron : Que lit-il ? Pourquoi écrit-il sur l’art ? puis, au cœur du numéro, pour son œuvre propre d’artiste/écrivain: « La Mélancolie des fragments », petite somme d’images (photos et peintures) et de texte à la fois littéraire et méditatif qui s’achève ainsi : « Nous reste pour habiter la mélancolie des fragments.»
Gilles Du Bouchet soumis à l’inconfort de la question sur ses lectures répond dans un texte en forme d’adresse à François-Marie Deyrolle : « C’est dire le malaise, cher François-Marie, que m’inspire la question telle que posée. Que ce soit celle qui s’adresse aux écrivains ‘’ pourquoi écrivez-vous sur l’art’’ ou celle…à laquelle je m’efforce de ne pas répondre ! Comme si ces deux questions adressées successivement à deux catégories d’acteurs distincts apparaissaient d’entrée de jeu comme lourdement grevées d’un préjugé : celui qui ferait des mots du langage une frontière, de part et d’autre de laquelle situer ‘’artistes’’ d’une part et ‘’écrivains’’ d’autre part dans un partage des rôles conventionnels. » N’est-ce pas à l’inverse la mission à laquelle se consacre L’Atelier contemporain que de ne pas séparer « l’usager des mots et celui des pigments » mais au contraire de faire se multiplier les résonances entre la matière des uns et la manière des autres? Ce numéro 2 en est une éclatante démonstration : chambre d’écho, oui.
André Chabin