Le dernier numéro de Vacarme s’ouvre sur un texte collectif (comme la revue en a pris la belle habitude) consacré à l’Europe : « Politiser les politiques européennes » : « Les élections européennes arrivent et on a envie de pleurer. Le mur, le mur, le mur : à l’orée de leurs cinquante ans, les institutions européennes vont dans le mur, dépouillées de toute gratification de résultat, dépouillées de toute légitimité démocratique.» écrit le collectif en amorce de l’article. Pour Vacarme, pas de délectation morose face à ce constat, ne pas céder non plus à la facile tentation du renoncement. L’Europe est nue, faut-il la répudier ? Non, disent-ils pas plus qu’il ne faut abandonner l’euro. Dénonciation plein cadre des politiques européennes actuelles: infamie des cures d’austérité infligées, infamie des politiques migratoires, horreur du libéralisme tout puissant…Alors ? L’Europe, il faut la rhabiller : d’abord ne pas confondre ce qui l’a fondée avec ce qu’elle est devenue, ses fruits avec ce qui la gâte, ensuite, Vacarme le tente, imaginer les politiques souhaitables par une série de propositions concrètes : prendre à gauche.
Puis la revue déploie son habituel écheveau d’interventions et de textes si dru qu’on ne sait quel fil tirer : « Spy mania » un gros dossier sur l’espionnage, la voix précieuse de la poétesse américaine Cole Swensen (« Paysages sur un train »), les images graves d’Isabelle Otero pour son film A ciel ouvert ou encore le long entretien final avec l’historienne Joann W. Scott : « mon objet ? décrire la façon dont les gens qui vivent dans un rapport inégalitaire l’éprouvent, le pensent et le formulent » ou encore « Nous reconnaissons les féministes “à la française” et les féministes “à l’américaine” à leurs chaussures ! » Énigme pour un espion… Pourquoi pas Marcel Proust que Dominique Dupart nous présente comme un aïeul de Snowden et Manning ?
Frédéric Repelli