Chatoyante, moirée : une revue qui déplie les nuances colorées et sensuelles d’une étoffe précieuse. Noor et ses cent lumières : brodée de courts textes – entretiens, fictions, analyses – drapée d’œuvres plastiques et de photographies, dans une mise en page inventive, d’une élégance graphique sans ostentation. Cette revue pour un islam des Lumières est d’abord un bonheur de feuilletage. Elle est surtout une petite machine pour mettre à bas les préjugés : l’islam ici est divers, créatif, en mouvement. Pascal Picq interrogé par Malek Chebel, le directeur de la revue, ouvre cette livraison : « il faut décoloniser notre imaginaire » pour se clore sur un portrait de Georges Balandier, entre les deux, profusion de rencontres : avec Abel Llifi (« l’islam n’est ni un problème ni solution, seulement une religion, une culture… »), Frédéric II en précurseur du dialogue avec les musulmans, dans Soweto 1976 (combien de morts ?), aux portes de Sidiro (où est-ce donc ?), parmi les arbres de la place Taksim, en compagnie d’Alexandre Romanès… Un portfolio voluptueux de Reza, un autre de Pauline Beugnies dans la lumière d’Imem, sœur musulmane rebelle. 2 pains au chocolat et 1 banane composent pour Aaron Levin l’image d’un (désolant/désolé) « goûter français ».
Marc Norget